Les grands sakés d’Hiroshima

Découvrez le shubo, une étape longue mais essentielle dans la fabrication du saké

Le shubo et sa fabrication

Qu’est-ce que le shubo ?
En un mot, le shubo est ce qui permet de cultiver la levure.

Pour faire du saké, mélanger de l’eau et du riz et les laisser reposer ne suffit pas. Il faut d’abord cuire le riz à la vapeur, y ajouter du kōji et de l’eau et cultiver des levures. Pour que la fermentation alcoolique se produise dans de bonnes conditions, le shubo est indispensable. Ce liquide est en quelque sorte la “matrice” du saké.
En japonais, “shubo” signifie littéralement “mère du saké”. On emploie aussi le mot “moto”, qui signifie “base”.

On appelle “shubozukuri” le processus de culture pure de levure en grande quantité, qui a lieu avant de passer à l’étape de fermentation. La température et l’hygiène sont contrôlées strictement tout au long de ce processus qui dure entre deux semaines et un mois. C’est grâce à la présence des bactéries lactiques qu’on évite l’apparition de germes indésirables.

L’influence du shubo sur le goût du saké

Selon la méthode employée pour fabriquer le shubo, on parle de shubo de type sokujō ou bien de shubo de type kimoto.
Voici leurs caractéristiques respectives :

Type de shubo

Principale levure utilisée

Arômes et goût du saké

shubo de type sokujō

méthode sokujō

saccharification à haute température

  • Arômes floraux
  • Délicats en bouche, finale propre
  • Une large gamme de saveurs, mais une sensation de délicatesse
  • Légers et secs
  • S’accordent facilement avec n’importe quel type de plat, modérément aromatiques

shubo de type kimoto

méthode kimoto

méthode yamahai

  • Des saveurs rustiques
  • Des arômes de riz et de kōji
  • Une finale longue
  • Des saveurs variées et complexes
  • Des saveurs qui se développent lorsqu’ils sont bus chauds

Les 3 méthodes de fabrication du shubo
Kimoto
Yamahai
Sokujō

La méthode Kimoto

Cette méthode, inventée au milieu de l’ère Edo, période Genroku (1688-1704) consiste à attendre l’apparition naturelle d’acide lactique.
Après avoir ajouté de l’eau au riz cuit, on le remue et on l’écrase à l’aide d’un outil ressemblant à une pagaie, afin qu’il se dissolve et se saccharifie. On appelle cette tâche “yamaoroshi”. On attend ensuite que des bactéries lactiques pénètrent dans le mélange et se développent. Après cela, les bactéries lactiques commencent à fermenter et à produire de l’acide lactique dans le shubo. Plus le shubo est concentré en acide lactique, plus il devient acide. L’acidité détruit les germes indésirables et les levures sauvages.
Avec la méthode kimoto, la fabrication du shubo, qui permet ensuite la multiplication des levures de saké, prend environ 30 jours.On obtient des sakés au goût riche et complexe, et à l’acidité élevée.

La méthode Yamahai

C’est une méthode assez similaire à la méthode kimoto, à la différence qu’il n’est plus nécessaire de procéder au “yamaoroshi”. En effet, ce sont les enzymes qui se chargent de dissoudre le riz, ce qui libère les brasseurs d’une tâche longue et pénible. Cette méthode procure aux sakés de la robustesse et une acidité et des saveurs umami puissantes.

La méthode Sokujō

En ajoutant de l’acide lactique très pur au shubo, on parvient à éliminer les germes ce qui permet de fabriquer le shubo beaucoup plus rapidement et efficacement qu’avec les méthodes traditionnelles. On gagne en effet deux semaines.
Lorsque l’acidité est suffisante à l’intérieur de la cuve à shubo, et que les germes ont été éliminés, on peut y introduire la levure. On utilise soit une levure Kyōkai, distribuée à toutes les brasseries par l’Association des Brasseurs du Japon, soit une levure élaborée sur place.
Avec la méthode sokujō, on obtient généralement des sakés très aromatiques, frais, légers et secs.

La méthode sokujō est la plus couramment employée, mais certaines brasseries fabriquent encore le saké avec la méthode kimoto

Lorsque la levure commence à se multiplier, de nombreuses bulles se forment. C’est ainsi que l’on cultive la levure à saké en grande quantité. Le shubo qui en résulte ressemble à une bouillie pâteuse, plutôt sucrée, acide et au goût très prononcé. On va utiliser cette bouillie dans l’étape suivante, celle de la fabrication du moromi ou saké non raffiné.
La méthode sokujō est de nos jours la plus couramment employée, mais certaines brasseries fabriquent aussi leur saké avec la méthode kimoto.

Une méthode de saccharification à haute température du shubo encore plus rapide que la méthode sokujō, développée dans les brasseries d’Hiroshima

C’est Kiomaro Nakao, quatrième génération de la Brasserie Nakao, qui en 1947, a mis au point et perfectionné la méthode de saccharification à haute température du shubo (kō-on tōka shubo).

Avec le développement de cette méthode, l’entreprise a reçu le 1er prix du mérite technique de l’Association des brasseurs japonais. De nombreuses brasseries d’Hiroshima l’ont adoptée, et 60% du saké présenté dans les concours à travers le pays serait fabriqué de cette manière.

La saccharification à haute température est la première étape intervenant lors de la fabrication du shubo. Sa particularité réside dans le fait que le riz cuit, le kōji et l’eau sont maintenus à une température de 55°C pendant huit heures.

On enroule une natte isolante autour de la cuve contenant le shubo. Maintenu à haute température sur une longue durée, le shubo est ainsi protégé de l’apparition de germes et levures sauvages. 55°C est une température idéale qui permet non seulement d’activer le processus de saccharification, mais aussi de conserver les enzymes de kōji. En effet, vulnérables à la chaleur, ces enzymes sont détruites à partir de 60°C.
L’autre avantage de cette méthode est qu’elle permet de fabriquer le shubo en seulement 10 jours. On obtient également des sakés au goût plus propre, sans altération de goût, qu’avec les méthodes kimoto et sokujō.

Voici les trois caractéristiques de la méthode de fabrication de saké à l’eau douce, mise au point à Hiroshima :
⁃ une utilisation optimale de la levure
⁃ un kōji cultivé avec soin
⁃ un moromi qui fermente longuement et à basse température
On peut dire que c’est la méthode de brassage de saké à l’eau douce qui a rendu possible l’emploi de la méthode kimoto à l’eau douce. Pour en savoir plus sur cette méthode : Une méthode de brassage à l’eau douce qui fait la particularité des sakés d’Hiroshima. Comprendre les différences de goût en comparant eau douce et eau dure.

Il faut d’abord cultiver soigneusement le kōji pour qu’il se diffuse jusqu’au cœur des grains de riz. Le riz peut ainsi être saccharifié et fermenter correctement lors de l’étape suivante. En effet, seul un kōji puissant parvient à libérer les minéraux nécessaires à une fermentation aussi vigoureuse dans une eau douce que dans une eau dure.

Le brassage à l’eau douce demande donc plus de temps et d’efforts, mais c’est précisément pour cette raison qu’il produit un saké au goût pur, comme les sakés Ginjo.

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