Les grands sakés d’Hiroshima

Une boutique de produits alimentaires japonais à Saint-Nazaire. Comment a-t-elle été accueillie dans la ville ?

IMA

Nous avons interrogé Naoko Hirobe, qui a ouvert une boutique de produits japonais à Saint-Nazaire en 2019, sur la perception de la cuisine japonaise et du saké dans une ville de région française.
Hirobe Naoko

 

Naoko Hirobe habite en France depuis 2005.
Après avoir travaillé en tant que freelance à la vente de produits alimentaires japonais en France, elle ouvre sa propre boutique à Saint-Nazaire, en 2019.

Comment vous est venue l’idée d’ouvrir cette boutique ?

Mon travail consistait jusqu’à présent à soutenir la vente de produits alimentaires japonais en France et je me suis aperçue qu’il existait peu de points de vente où l’on prend aussi en compte l’histoire de ces aliments en dehors de Paris. J’ai donc pensé qu’il y avait une opportunité et ai ouvert ma propre boutique à Saint-Nazaire en novembre 2019.

Quel genre de ville est Saint-Nazaire ?

C’est une ville de 80 000 habitants située dans l’ouest de la France, à l’ouest de Nantes. En incluant les villes voisines, on compte une population de 200 000 habitants. Face à l’océan Atlantique, on trouve du poisson et des fruits de mer frais en abondance, et on n’a pas peur des plats qui combinent fruits de mer et produits des terres.
Traditionnellement, il s’agissait d’une ville centrée sur l’industrie lourde, telle que la construction navale et l’assemblage d’avions, et de nombreux cols bleus y vivaient, mais ces dernières années, avec l’informatisation de l’industrie, le nombre d’ingénieurs a augmenté, et des travailleurs indépendants sont également venus s’installer dans la région. Comme il s’agit d’une ville portuaire de taille moyenne, on ne s’y sent pas cloisonné, et on a l’impression que les gens ne sont pas trop réfractaires aux choses venues de l’étranger. Au contraire, ils semblent les accueillir avec intérêt.

Quel type de clientèle recevez-vous ?

Des trentenaires qui ont déjà voyagé au Japon ou qui ont un rapport avec le pays, des vingtenaires fans du Japon, des soixantenaires qui ont beaucoup d’estime pour la culture nippone, et plus globalement, des personnes qui ont une image très positive de l’archipel. Les personnes qui pratiquent les arts martiaux comme le judo ou l’aïkido, ceux qui aiment la littérature japonaise, ou bien le thé, ou qui ont tout simplement de l’intérêt et de la curiosité pour notre pays sont également nombreux à me rendre visite. Ma boutique attire aussi les personnes avec un penchant pour la nouveauté ou les produits haut de gamme, puisque c’est ma spécialité. Je reçois également des adolescents venus se procurer du Ramune ou du Hi-Chew.

Comment faites-vous le choix des produits que vous proposez à la vente ?

Je me fournis principalement chez trois ou quatre grossistes qui proposent des produits de producteurs en lesquels j’ai confiance. Ensuite, pour le curry, les ramen instantanés, les biscuits, etc., je cherche les articles les moins chers possibles à condition qu’ils soient identiques à ceux que l’on trouve au Japon. Je propose parfois des produits non-japonais, mais uniquement si j’ai pu les goûter et qu’ils m’ont convaincue.
Ma clientèle étant principalement constituée de Français de la région, j’essaie d’en apprendre un maximum sur le terroir, le producteur, et l’histoire des produits que je vends afin de pouvoir le leur expliquer. Par exemple, s’il s’agit de miso, j’explique la différence entre le miso d’orge de Shinshu et le miso de riz de Kyushu, et pourquoi le miso de Kyushu est plus doux que celui de Shinshu. Et si le producteur a une longue histoire, j’aime aussi la raconter à mes clients.
Lorsque je vends du saké, je parle aussi de la brasserie qui le produit, quand celle-ci a été fondée, combien de générations s’y sont succédées, quel genre de saké elle élabore. Tout comme lorsque l’on boit un vin de Loire produit par un viticulteur de la région, j’aime faire en sorte que l’on garde à l’esprit qu’il y a bien un être humain, avec une histoire, derrière chaque saké que l’on déguste.

Saint-Nazaire étant une ville de région, y a-t-il une différence par rapport à la capitale, dans le degré de connaissance de la cuisine et du saké japonais ?

Les clients venus de Paris (ceux qui ont une maison secondaire dans la région, qui viennent en vacances ou se sont installés récemment) connaissent en effet mieux les produits japonais. Mais je peux vous assurer que quelque soit votre connaissance de la culture culinaire japonaise en venant dans ma boutique, vous en saurez plus en repartant ! En ce qui concerne le saké, je dois encore expliquer à 7 personnes sur 10 que ce n’est pas l’alcool fort et distillé qu’ils imaginent être.

Y a-t-il des sakés et des produits alimentaires que l’on peut acheter ensemble ? Quelles sont les combinaisons les plus courantes ? Avez-vous des recommandations ?

Il est rare que les gens m’achètent du saké et de la nourriture ensemble. Cependant, il m’arrive de recevoir des clients qui se sont procuré des sushis ailleurs et qui viennent chercher un saké pour les accompagner. Ou pour déguster avec des huîtres et des fruits de mer puisqu’on en consomme beaucoup dans la région. Mais la plupart d’entre eux ont peu de connaissances préalables, et commencent à s’intéresser au saké une fois que j’ai pu leur en parler. Certains clients viennent acheter du saké pour l’apéritif.
Lorsque les clients n’ont jamais bu de saké, je leur demande ce qu’ils comptent manger avec et m’intéresse à leurs goûts en vin ou autres alcools. Ainsi, je leur fais goûter deux à trois sortes de saké afin qu’ils puissent choisir ce qui leur plaît. Au départ, je faisais goûter un grand nombre de saké, mais maintenant, je peux réduire à trois en fonction de leurs goûts en vin. Par exemple, je propose du saké au goût rafraîchissant à ceux qui apprécient le blanc Muscadet, en revanche, je proposerai plutôt un saké au goût riche aux amateurs de vin rouge, et un saké de type Junmai à ceux qui aiment les Bordeaux corsés. S’ils comptent boire le saké pendant le repas, je compose aussi en fonction des plats qu’ils ont prévu de servir.
Lorsque je propose du saké d’Hiroshima, si le client me dit qu’il aime le whisky, alors je conseille d’abord le “Hakuko Yonjikomi Junmai label rouge” de la brasserie Morikawa, ou le “Shinriki” de la brasserie Miyake. Ces sakés, qui ont du caractère et de la profondeur, sont souvent plus appréciés que ceux au goût léger et rafraîchissant.

Donnez-vous des conseils à vos clients sur les accords plat / saké ?

Oui, j’essaie d’informer autant que possible sur les plats qui se marient bien avec le saké. Comme Saint-Nazaire se trouve au bord de la mer, je pense beaucoup aux associations saké / poisson. Par exemple, un saké fruité et léger pourra être servi avec des huîtres, un saké légèrement acide en revanche fonctionnera mieux avec un poisson gras.
Un Junmai légèrement moelleux, et bu frais, pourra accompagner n’importe quel type de poisson ou de sushi. Bu chaud, il sera un peu sucré, et sera parfait consommé avec un steak ou du porc sauté.

D’autres projets ?

Lorsque l’épidémie se sera un peu calmée, j’aimerais participer plus activement à des salons en lien avec l’alimentaire.
J’aimerais approfondir davantage mes connaissances et mon expérience, et continuer de faire connaître la culture et la cuisine japonaises en France tout en parlant du travail des producteurs.


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