Les grands sakés d’Hiroshima

Comment est perçu le saké dans la région viticole de Mâcon ?

David Bernard Saké sommelier
David Bernard est diplômé de l’école hôtelière Vatel de Lyon. Il est aujourd’hui le patron du restaurant Azuki et de l’épicerie fine « Autour du Yuzu » à Mâcon, en Saône-et-Loire. Membre du jury du concours Kura Master, le saké japonais est devenu sa passion.


– Que pensez-vous du marché du saké en France ?
En quatre ans, je constate une très belle progression. Il s’agissait naguère d’un marché de niche qui a commencé à se développer grâce aux chefs de la gastronomie française. Mais aujourd’hui, dans notre restaurant, la force de vente, ce sont les clients. Beaucoup d’entre eux ne confondent plus désormais le saké avec un alcool fort. Et ils nous font confiance pour leur présenter de nouveaux sakés, que ce soit quand ils viennent dîner au restaurant ou choisir une bouteille à la boutique.

– Quelle place selon-vous les sakés de Hiroshima ont-ils sur le marché français ?
C’est une question difficile, car il n’y a pas avec le Japon cette notion de terroir auquel peuvent se rattacher les amateurs de sakés, comme nous l’avons, par exemple, pour le vin avec le vignoble du Mâconnais, territoire méridional de la Bourgogne. Néanmoins, Hiroshima bénéficie d’un atout de taille vis-à-vis d’autres régions japonaises, car tout le monde connaît ce nom qui suscite en général beaucoup d’empathie et d’émotion. Et cette sensibilité liée à Hiroshima joue en faveur des sakés élaborés dans cette préfecture.

– Pouvez-vous nous citer quelques-uns des sakés de Hiroshima que vous proposez ? Et pourquoi avoir choisi ceux-là en particulier ?

J’adore l’Hakuko « Blue Bottle » de Morikawa Shuzo. Sur sa jolie bouteille bleue est accrochée une petite plaquette de cèdre japonais. On peut la tremper, en touillant légèrement, dans un verre de saké, pour lui donner un léger goût boisé. Je le propose en accord avec un bœuf gyudon ou du canard, quelque chose de sanguin. C’est magique ! J’aime aussi particulièrement le Seikyo Maboroshi de Nakao Jôzô, pour son côté végétal et très frais qui donne l’impression de pénétrer dans une forêt de bambou. Il peut être un peu déconcertant car il possède des notes aromatiques que l’on ne trouve pas dans le vin. Je le conseille avec un poisson blanc, cuit à la vapeur, ou poché, ou encore avec des fruits de mer cuits. J’apprécie aussi les sakés de la Maison Kamotsuru, plus traditionnels, plus faciles d’accès également qui conviendront aux personnes curieuses mais encore timides vis-à-vis du nihonshu. On peut le servir à n’importe quelle température. Il est facile. C’est un peu le « couteau suisse » des sakés de Hiroshima. En tout, je propose une quinzaine de sakés de cette région.

– Comment avez-vous connus les sakés de Hiroshima ?
Même si j’avais eu un premier coup de cœur avec le Hakuko de Morikawa Shuzo, la visite à Mâcon d’une délégation de Hiroshima, emmenée par Tomoko Pekon, attachée de presse du concours Kura Master et guide touristique en Bourgogne vinicole, m’a permis de m’ouvrir à d’autres références et de tisser un lien étroit avec cette région. Mon récent voyage dans cette préfecture, début mars dernier, juste avant le confinement, et la découverte, sur place, des Maisons de saké ont été pour moi une révélation.

– Quand vous servez du sakés à vos clients, comment leur présentez-vous ?
Je leur présente brièvement l’histoire de la Maison qui produit ce saké. Je leur donne une ou deux informations, comme le type de riz, parfois une anecdote, mais jamais plus, juste de quoi satisfaire leur curiosité. Ce n’est pas un cours, mais avant tout du plaisir. Quand ils sortent de notre restaurant, ils doivent avoir le sentiment d’avoir accompli un voyage, d’avoir été, même pour un court moment, en immersion dans la culture japonaise. Mais ce qui fait la différence chez nous, c’est réellement le saké. Sur notre carte, nous avons bien sûr des vins, mais l’accent est mis sur le saké. Nous en proposons toujours, au moins pour goûter. Notre objectif est de casser cette crainte qu’ont encore certaines personnes de se retrouver avec un alcool fort dans leur verre. Je me risque même à parler de « vin de riz » – une hérésie pour les puristes – afin d’ôter définitivement de la tête de mes clients l’image d’une boisson distillée.

– Comment voyez-vous l’avenir du saké en France ?
Je suis plutôt positif. Plus le temps passe, moins nous avons d’efforts à faire pour convertir nos clients au saké. Le saké doit juste devenir de plus en plus visible, peut-être même en passant un jour par le canal de la grande distribution. En quatre ans, dans mon restaurant, j’ai accru mes ventes de saké de 200 %. J’en vends même quatre fois plus que du vin. C’est très encourageant !



Restaurant AZUKI
24 Rue de Lyon, 71000 Mâcon
https://www.restaurant-azuki.fr/

Epicerie fine japonaise
Autour du Yuzu
97 rue Dombey 71000 Mâcon
https://www.autour-du-yuzu.fr/

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